Ce mandement, nommé aussi mandement d’Embrun, appartenait par moitié à l’archevêque et au Dauphin, en vertu de transaction de 1210, 1237 et 1247. Mais si cet état de choses avait été régularisé par ces transactions, il avait une origine beaucoup plus ancienne ; il provenait d’usurpation consommées d’un commun accord par l’archevêque et le comte de Provence, à la fin du Xe ou au commencement du XIe siècle, de droits et de revenus qui appartenaient régulièrement aux roi de Bourgogne. Les empereurs, héritiers de ces rois, acceptèrent le fait accompli et le légitimèrent par plusieurs diplômes. Les Dauphins héritant de cette situation quand ils succédèrent aux comtes de Forcalquier, se contentèrent de la régulariser. Tout était commun entre les deux coseigneurs, terres, justice et droits féodaux, et la ville d’Embrun elle-même était partagée par des murailles en deux cités: l’une épiscopale entourant la cathédrale, l’autre delphinale autour du palais du Dauphin (aujourd’hui les casernes).
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-L’ordre du Temple eut une commanderie à Embrun ; il possédait une église de Sainte-Marie du Temple dont les ruines se voyaient encore sous le Roc au XVIIIe siècle. C’est principalement de ce côté qu’étaient ses possessions ; un quartier s’y nommait encore le temples en 1472. De cette commanderie relevait les terres possédées par l’ordre à Montmirail (Voyez cet article). L’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, héritier des Templiers, eut également une commanderie à Embrun. Au XIVe siècle tous les biens possédés par cet ordre dans l’Embrunais et le Briançonnais en dépendaient ; la petite commanderie de l’Argentière lui fut unie dans les premières années de XIVe siècle. Son existence ne fut néanmoins pas de longue durée: dans l’intervalle de 1319 à 1336 elle fut unie à celle de Gap dont le titulaire porta le titre de commandeur de Gap et d’Embrun jusqu’au XVIe siècle. En 1667 l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem ne possédait plus rien dans le territoire d’Embrun. Voici la liste des commandeurs d’Embrun avant l’union de cette commanderie à celle de Gap
Falicon, | 1247 |
Raymond Chabaud, |
1266 |
Guillaume Boyson, |
1276 |
Raymond Osasica, commandeur
d’Embrun et de Gap |
1298-1300 |
Pierre de Saint-Martin, |
1300 |
Barras de Barras, |
1314 |
Geoffroy de Cubriis, commandeur d’Embrun et de
Gap, |
1316 |
Pierre de Saumane, |
1319 |
-Les plus anciens établissements hospitaliers
que j’aie trouvés à Embrun sont l’hôpital
supérieur ou de Saint-Marcellin existant en 1279,
l’hôpital inférieur ou de Saint-Esprit à la
même époque et enfin une Maladrerie existant en 1316
à peu de distance du cimetière actuel, sur l’ancienne
route d’Embrun à Chorges. L’hôpital de Saint-Marcellin
était desservi par les frères de Sainte-Marie-Madelaine.
L’hôpital du Saint-Esprit, qui existe encore, a absorbé
toutes les maisons hospitalières d’Embrun et a
hérité d’une partie des biens de l’abbaye de Boscodon
lors de sa suppression en 1769
-Sur la rive gauche de la Durance était une ancienne maison
hospitalière nommée la Madeleine ;
supprimée au XVIe siècle, elle fut donnée au
collège
des Jésuites d’Embrun, puis aliénée peu
d’années
après.
- L’archevêque Charles Brulardt de Genlis fonda le séminaire d’Embrun en 1705: il en confia la direction aux Jésuites et le fit construire tout à coté du collège qu’ils dirigeaient. En 1780 le personnel se composait de trois professeurs et d’un supérieur. Avant cette fondation, le chapitre avait réservé deux de ces prébendes pour l’entretien de professeurs chargés d’enseigner aux clercs embrunais la théologie, la philosophie et les autres arts libéraux; mais la plupart de ceux qui se destinaient au sacerdoce allaient prendre leur grades à l’université d’Avignon
-Jean de Embroniaco, fondateur du collège de
Saint-Nicolas à Avignon, en 1424, y avait réservé
deux places pour des Embrunais ; trois autres places leur
étaient également réservées aux
collèges
de Montélimar et de Valence. Ce fut en l583 seulement, sous
l’inspiration de l’archevêque Guillaume de Saint-Marcel
d’Avançon, que fut fondé le collège municipal
d’Embrun. La direction en fut confiée aux Jésuites ; mais
les protestants s’étant emparés d’Embrun en 1585, et les
Jésuites ayant été ensuite chassés du
royaume, le collège ne fut réellement que par une
ordonnance royale de février 1604. La ville
d’Embrun donna au collège une rente de 1,1200,
l’archevêque
600, le chapitre 600, l’abbé de Boscodon 150 ; on lui unit les
prieurés de Saint-André des Beaumes de 1,000 livres de
revenu
; du Saint-Sépulcre de Chorges et de Saint-André de Gap.
- L’archevêque Guillaume d’Hugues fit
construire en 1642, à ses frais, son église qui
coûta 6,000 livres; Jacques Javelli, chanoine, lui donna tous ses
biens avec lesquels on acheta, en 1686, la seigneurie
d’Orcières 8,800 livres. Le personnel se composait de
douze pères, dont cinq professeurs. Après la suppression
de l’ordre des Jésuites (1763), la
direction du collège fut confiée à des
prêtres séculiers; le personnel se composait de neuf
ecclésiastiques, dont sept professeurs. L’archevêque de
Leyssin y fonda trente bourses. Cet établissement a
prospéré jusqu’à la Révolution.
- Le culte protestant fut établi à
Embrun après la prise de cette ville par Lesdiguières, et
fut exercé jusqu’à la révocation de
l’édit de Nantes (1585-,1684), Voici les noms de quelques-uns
des pasteurs
d’Embrun:
Perrot |
1596-1597 |
Hugues Mathieu |
1600-1622 |
Jean Conel |
1617-1630 |
Jacques Bailly |
1637 |
Siméon Coing |
1660 |
Elie Saurin |
1664 |
Jacques Pierre |
1675 |
Pierre Siméon |
1684 |
-Le Temple fut démoli par arrêt du conseil de roi du 20
juin 1684
-Embrun et son mandement étaient un fief commun entre l’archevêque et le Dauphin, successeur des comtes de Forcalquier. Ce condominium organisé, au dire des archevêques, à la suite des victoires du comte Guillaume de Provence sur les Sarrasins, fut confirmé et régularisé par plusieurs transactions depuis 1147 jusqu’en 1247. Les deux coseigneurs percevaient par moitié les lods ou droits de mutation, les tasches, les corvées, les redevance féodales, la milice, les cas impériaux et les émoluments de la cour commune ; c’étaient le châtelain delphinal d’Embrun et le clavaire ou trésorier épiscopal qui percevaient ces droits. Le Dauphin avait en outre droit à cent fantassins et à quatre cavaliers fournis par la ville pendant un mois chaque année. Ce prince aliéna sa part de seigneurie, avec faculté de rachat, en 1543 et 1593.
1310, Jean II accorde des privilèges aux
foires d’Embrun
1442 et le 8 avril 1445, le gouverneur du Dauphiné
confirme aux Embrunais deux foires: le 22 mai et le 28 octobre
1462, 5 septembre, le même magistrat leur
concède une nouvelle foire le 18 octobre; le roi approuve cette
concession en 1472. Les Habitants de Guillestre s’étant
opposés par la violence à la tenue de cette foire, ceux
d’Embrun la leur cèdent en 1475 et en compensation ils
achètent la foire du 1er novembre qui se tenait à
Baratier; elle est fixée en 1560 à
huit jour avant la toussaint. La même année une
autre foire
du 1er mai est transférée au 16 mars et l’on en
crée une nouvelle le 22 août. Les consuls percevaient sur
les marchandises apportées à ces foires, qui
étaient fort importantes, un droit nommé la Leyde.
Il nous reste un tarif des droits de Leyde d’Embrun du
commencement du XVe siècle; ce
document a été publié dans le bulletin
des sociétés savantes (1885)
En 1457, un nommé Claude Bellon établit dans la
ville d’Embrun une fabrique de drap. En 1338, le 31 janvier,
les Lombard qui Trafiquaient dans Embrun obtiennent la liberté
du commerce moyennant 220 florins par an.
Il y eut à Embrun, à l’époque
mérovingienne, un atelier monétaire dont il reste un
très petit nombre de spécimens ; on l’a parfois confondu
avec celui
d’Yverdun (Suisse), dont le nom avait la même forme latin.
L’archevêque, en vertu des privilèges
concédés par l’Empereur en 1147, avait le droit de battre
monnaie. En 1294, le 13 mai, il y eut entre l’archevêque et le
Dauphin une transaction à propos de la monnaie d’Embrun, qu’ils
devaient
frapper en commun ; cet accord n’eut pas de suite. Il nous reste des
monnaies
frappées de 1294 à 1355, sous les épiscopats de
Raymond
de Mévouillon et de Pasteur de Sarrescuderio. Par ordonnance
rendue
en 1442 par le gouverneur du Dauphiné, la monnaie de
l’archevêque
d’Embrun fut décriée dans cette province.
Un atelier royal fut créé à
Embrun en 1406 et dura jusqu’en 1417 sans interruption. On le
transféra alors à Mirabel, puis on essaya, en 1426, mais
sans succès, de le rétablir à Embrun. Il fut
définitivement installé à Montélimar. Le
signe distinctif des monnaies royales
d’Embrun est un point sous la troisième lettre de chaque
légende.
Le plus ancien volume imprimé à
Embrun l’a été en 1489, par Laurent de Rubeis, imprimeur
ambulant; c’est un bréviaire du diocèse, dont un seul
exemplaire est connu. Le missel d’Embrun fut imprimé pour la
première
fois, en 1520, à Lyon; il est fort rare.
Pendant le XVIe siècle on trouve quelques ouvrages avec
la fausse rubrique d’«Ambrun»; ce sont des
publications protestantes la plupart imprimées à
Genève.
Au XVIIIe siècle on connaît quelques opuscules
jansénistes imprimés dans les mêmes conditions.
En réalité, le premier imprimeur établi
à Embrun d’une manière permanente fut
Pierre-François Moyse, installé d’abord sur la Place
d’armes, puis dans le rue
d’Italie. Son plus ancien imprimé: Le Jubilé
universel
de l’année sainte, date de 1776. IL a imprimé
trois
ouvrages sérieux: L’histoire ecclésiastique,
naturelle, géographique et civile du diocèse d’Embrun, du
curé Albert, et deux volumes de botanique de l’abbé
Blanc,
plus une foule de brochures politique, religieuses, pédagogiques
et littéraires; son fils, qui lui succéda, ferma boutique
dans les premières années de notre siècle.
- Le sceau du chapitre d’Embrun, au XIIIe et au XVIe
siècle, représentait la Vierge debout. Ses armoiries
étaient: De gueules au pallium d’argent chargé de
cinq croisettes de sable, accompagné à gauche d’une mitre
d’argent et à droite d’une crosse d’or.
- En 1204 le comte de Forcalquier
autorisa la ville d’Embrun à se servir de son sceau pour sceller
ses actes; les consuls s’en servaient encore en 1237 ; en 1254 le sceau
représente, d’un côté, les cinq consuls debout, et,
de l’autre, une porte de ville. Les armoiries d’Embrun sont: D’azur
à la croix d’argent.
- Les Jésuites avaient pour sceau le monogramme I
H S sur les trois clous de
la passion et surmonté d’une croix
- Les Capucins portaient: D’argent à deux bras de gueules
en sautoir cloués d’or sur une croix de gueules.
- La Visitation portait: D’or à un
cœur de gueules sur lequel est écrit
I H S d’or, sur monté d’une croix de sable, posé sur deux
flèches en sautoir d’or, entouré d’une couronne
d’épines
en sautoir d’or, entouré d’une couronne d’épines de
sinople,
les épines de gueules.
FABRE, Recherches historiques sur les
pèlerinages des rois de France à Notre-Dame-d’Embrun.
Paris, Aubry, 1860, in-8°
GAILLAUD (l’abbé), Histoire de Notre-Dame-d’Embrun ou la
Vierge de la Réal. Gap, Jouglard, 1862, in-12.
MARIGNY, Embrun (album du dauphiné, t. II, p.21)
ROMAN (J.), Cinq ans de l’histoire d’Embrun. Gap, Jouglard,
1877, in-8°
ROMAN (J.), Embrun (Revue du Dauphiné et du Vvarais, 1877,
p.257)
SAURET (l’abbé), Essai historique sur la ville d’Embrun,
Gap, Delaplace, 1860, in-8°